I WILL ALWAYS LOVE YOU

Un peu de poudre sur le nez, un trait de crayon sous les yeux, un poil de far à paupière bleuté, et c'est tout ! Je ne voulais pas plus, je ne veux pas prendre le risque de finir maquillée comme Taylor Momsen, il faut rester simple, la simplicité est souvent signe de beauté. Vêtue de pas grand chose, plutôt dévêtue donc, je prenais place sur le siège en toile, sur lequel, mon nom était marqué, mais pas en lettres d'or. On venait me proposer quelques coupes de champagnes accompagnées de toasts, petits fours et autres amuses gueules. Bien sur, c'est pas de la camelote, c'est signé le plus grand chef d'Hollywood, dix neuf euros les cent grammes, généralement on ne peut refuser, mais la je devais faire une exception, mon ventre allait être présent sur les photos, il fallait pas qu'il prenne trois centimètre de plus. C'est vrai que ces cuisiniers connaissent tous les caprices des stars, ils font en sorte de ne pas mettre trop d'huile, de sel, de sucre, de beurre, et même trop d'eau. Sinon quel désastre !

Déjà un peu plus d'une heure de shoot, il faut un peu de repos, les photographes, adorables comme ils sont me laissent un quart d'heure, juste le temps de fumer une clope, pour ceux qui fument ou alors de boire un coup, de se remaquiller ou bien d'aller embrasser l'homme de sa vie. Je sortais le plus vite de cet endroit, non pas que je n'aime pas, mais l'ambiance devient lourde, les projecteurs toujours braquer sur vous, il faut de l'air, sinon tu te mets à transpirer et c'est plus très glamour. Alors que je me précipitais -pas au point de courir- d'un pas rapide, je ne fis pas attention à ce qui se trouvait aux alentours ni devant moi, et rentrai d'un coup dans le ventre d'un homme. Un homme que je connaissais, dont l'odeur m'était familière, dont son t-shirt aussi, blanc portant le chiffre 22 dessus. Un t-shirt qui ne s'oublie pas, un t-shirt fait sur mesure, je réalisai. Merde. Ryan ! " Merde ! Désolée. ". J'étais gênée, embarrassée, je voulais tracer ma route. Depuis quelques temps, enfin depuis que je savais que les sentiments pour Ryan étaient revenus, j'avais arrêté toute forme de taquinerie avec lui, mes conversations étaient froides. Je n'assumes pas d'être, probablement, toujours amoureuse de lui...

Il me regardait, amusé, de voir à quel point j'étais ridicule je suppose. Il m'empêcha de passer. J'osais à peine lever les yeux, de peur de traverser les siens, de me mettre à sourire puis à rougir. Je le sais qu'on est éperdus tous les deux l'un de l'autre mais ... on s'est séparés à cause de nos carrière, on les a laissés nous détruire, on a fait passer notre boulot avant nous. " Oh Ryan ! Comment ça va sinon ? "Non je ne l'avais pas du tout reconnu avant. C'était puéril et bête, mais je n'allais pas laisser un vide pareil, les moments sans paroles sont insupportables, ils gâchent tout !

« Il y a une marée dans les affaires des hommes, prise dans son flux, elle porte au succès, mais si l'on manque sa chance, le grand voyage de la vie s'échoue misérablement sur le sable. » Je m'arrêtais sur cette phrase dans le magazine que je lisais. Ce timbré de Shakespeare avait écrit des tonnes de belles choses, mais un truc aussi vrai, j'étais quasiment sûr que c'était une première. J'avais rendez-vous pour prendre des photos avec Michelle pour un magazine qui voulait faire une promo sur Blue Valentine et en même temps, nous demander si nous n'étions pas en couple. Entre elle et moi, ça n'avait toujours été qu'une partie de rire, de vrais amis, nous n'avions jamais été sous un ascendant amoureux. Elle pleurait la disparition de Heath, moi, j'attendais une Rachel numéro 2. Parce qu'avec la vraie, on avait tout gâché, je ne voulais pas risquer de lui avouer tout ce que je pensais, à moins de vouloir passer pour un idiot. Au départ, je n'avais pas voulu me rendre à cette séance photos, mais Michelle disait que ça allait être amusant. Pourquoi pas après tout ?

Un t-shirt et un jean, plus tard, j'arrivais sur le lieu du crime. Michelle n'était pas là. J'avançais distraitement vers le studio en regardant mes pieds, quand quelqu'un me rentra dedans. Blonde, bouclée, petite, fine. Son parfum me monta dans les narines. Rachel. Elle ne me regardait pas, elle paraissait gênée, ce qui eut tout de suite le don de me faire sourire. Elle bafouillait, poussant une injure. Je l'empêchais de passer, et de m'évincer comme ça. Etais-je vraiment plus qu'une connaissance à ses yeux ? Elle finit par me demander comment j'allais. Elle était bizarre. « Oh moi, je vais très bien. Mais toi t'es sûre que ça va ? » Je posais cette question en souriant, je n'avais pas l'habitude de voir Rachel dans cet état, elle qui était d'un naturel si vif.

Elle finit par lever les yeux vers moi, j'étais troublé de ne pas la voir sourire. Elle me troublait. Mal à l'aise je passais la main contre ma nuque. Un paparazzi passant devant le studio commença à prendre des clichés de nous : merveilleux. « Alors le nouvel homme de ta vie n'est pas là ? » Je voulais dire ça sous le ton de la plaisanterie, mais il se transforma rapidement en ton cinglant. Je déglutis quelque peu. J'allais passer encore une fois pour l'ex jaloux et pathétique. Son visage se détendit et s'éclaira peu à peu comme elle en avait l'habitude, mais je savais qu'elle s'apprêtait à rétorquer une remarque mesquine à ma question puérile.